Comité Scientifique #2

Le deuxième Comité scientifique d'Osuny s'est déroulé le 9 novembre 2023.

Pour rappel, le comité scientifique d'Osuny veille à la cohérence scientifique du projet et tisse des liens avec la recherche la plus récente. Il est composé de chercheuses et chercheurs relevant des communs, pouvant apporter un regard académique interdisciplinaire. Il donne un avis sur les orientations théoriques et pratiques du projet. Retrouvez ici le panel complet de ce comité scientifique.

La rencontre commence par un tour des dernières actualités d'Osuny, notamment la participation d'Osuny au projet de recherche "Digital Commons" du Post Growth Innovation Lab de l'université de Vigo. Ensuite, Magali Anglès présente ses axes de recherche. Enfin, après cette présentation, les participant.e.s entament une discussion ouverte.

Personnes présentes

Vincent Bachelet

Juriste, consultant, doctorant et militant des communs numériques

Ludovic Bonduel

Chercheur-doctorant en Science politique, spécialisé en Théorie politique (Libre université internationale des études sociales, Rome)

Sophie Pène

Professeure à l’Université Paris Descartes en sciences de l’information et de la communication, sociolinguiste, spécialiste des pratiques numériques.

Ben Robra

Chercheur postdoctoral en décroissance / postcroissance, innovation et organisation à l'Université de Vigo - Éditeur fondateur du Degrowth Journal

Sébastien Shulz

Ph.D et enseignant en sociologie, Animateur du groupe "politiques des communs numériques" (CIS-CNRS), Initiateur du Collectif pour une société des communs

Vera Vidal

Doctorante à l'université ouverte de Catalogne, travaille sur les plateformes coopératives.

Les dernières actualités d’Osuny

Le comité a commencé par une présentation des dernières actualités concernant Osuny, les différentes optimisations, l’obtention d’une subvention de la région Nouvelle-Aquitaine et les dernières productions.

Le projet de recherche "Digital Commons" du Post Growth Innovation Lab de l'université de Vigo

Dans un second temps, noesya a expliqué sa participation au projet de recherche du "Digital Commons" du Post Growth Innovation Lab de l'université de Vigo. Ce projet a pour but de comprendre la formation des réseaux d'organisations alternatives à travers l'utilisation de communs numériques. Le groupe de recherche cherche également à déterminer s'il y a des valeurs communes et à identifier les différences potentielles entre ces organisations. Dans leurs premières conclusions, Ben Robra et Alex Pazaitis, initiateurs de ce projet de recherche, ont mis l'accent sur la différence de noesya par rapport aux organisations économiques traditionnelles. Selon eux, noesya se démarque du monde capitaliste grâce à son histoire personnelle, ses valeurs et ses principes alternatifs. L'objectif de l'organisation est non seulement de survivre, mais aussi de prospérer pour ses membres. Ces derniers sont motivés par une volonté intrinsèque d'apprendre les uns des autres et de produire quelque chose de significatif.

Vous devez rester conscient et réflexif, et continuer à pratiquer ce que vous prêchez, de la manière qui vous convient.

Alex PazaitisChercheur chez TalTech, Membre du P2P Lab

S’en suit une discussion sur la distinction entre les valeurs individuelles et la valeur économique, le financement des communs et l'importance de fixer des limites pour préserver la créativité et l'épanouissement. Pour Sébastien Shulz, il est important de travailler sur la création de business model autour des communs numériques pour apporter de la valeur à l'économie numérique. Pour Ben Robra, il est nécessaire d'ajouter de nouvelles réflexions sur les valeurs de décroissance, le dépassement du capitalisme. Selon Ludovic Bonduel, un aspect important dans la différence entre les organisations actuelles basées sur les communs numériques et celles de l'économie sociale et solidaire est la dimension de l'ouverture. Ces nouvelles organisations cherchent à dépasser les frontières traditionnelles des coopératives et à créer un réseau de solidarité plus étendu.

"Quelle est la différence entre une entreprise classique de l'économie sociale et solidaire et une entreprise sociale basée sur les communs numériques ?

Sébastien ShulzDocteur et enseignant en sociologie

Ben Robra s'intérresse également à l'idée de réseautage. Selon lui, il est intéressant de voir comment les réseaux informels se forment et interconnectent différentes organisations de mise en commun, encourageant l'adoption de comportements partagés. Cela devient une tâche de réflexion non seulement au niveau individuel et organisationnel, mais aussi à l'échelle du réseau.

Ce qui est intéressant, c'est de voir comment ces réseaux se forment. Ce que nous constatons déjà au sein de ces différentes organisations, c'est la construction de réseaux informels très forts, où les valeurs sont partagées et interconnectées. Ainsi, elles s'encouragent mutuellement à adopter ces comportements.

Ben RobraChercheur en décroissance/postcroissance, innovation et organisation

Appels à projets nationaux

noesya se pose la question de répondre à des appels à projets nationaux comme celui d'Econum - lien externe. Dans le cadre du plan France 2030, cet appel à projet vise à encourager l'émergence de projets innovants afin de réduire l'empreinte environnementale du numérique.

Arnaud Levy demande au comité leur avis concernant la réponse à cet appel à projet. Selon lui, cet appel à projet est une opportunité, mais c’est un projet conséquent. Faut-il saisir cette opportunité ou est-ce que ce n'est pas la bonne voie à suivre ? Est-ce que c'est trop tôt ?
Sophie Pène suggère qu'il est trop tôt pour candidater à cet appel à projet et propose plutôt de rejoindre un consortium régional compte tenu de la situation actuelle de noesya.
Pour Alex Pazaitis, tous ces appels à projet offrent de bonnes opportunités de coopérer avec des institutions, qu'elles soient privées, publiques ou mixtes. Selon lui, en France, il y a une disposition plus favorable en ce qui concerne les moyens alternatifs d'organisation. Il pense que cela vaut certainement la peine de participer à ces projets, ne serait-ce que pour créer des alliances.

Recherche de Magali Anglès

Magali Anglès a présenté brièvement ses axes de recherche et a pu bénéficier de conseils et d’orientations pour sa recherche.

Pour Sophie Pène, l'un des piliers de l'adoption de ces communs pourrait être les chercheurs, car ils sont proches de la culture des communs. Elle nous explique qu’il y a 10 ans, la culture ouverte et la culture des communs étaient présentes dans l'équipe informatique des universités. Selon elle, la question de la gestion du budget a donné un pouvoir important aux entreprises privées telles que Microsoft, SAP, etc. De plus, les universités sont autorisées à fonctionner sans aucun soutien du ministère de la recherche et de l'éducation. Cela pose un problème d'autonomie de l'université et un manque d'argent. Ainsi, pour obtenir des résultats rapidement, l'équipe informatique préfère utiliser Microsoft, Amazon et le cloud d'Amazon. Le cloud est un point clé et Amazon est maintenant un nouvel acteur. C'est une réalité regrettable pour elle, mais c'est la situation dans la plupart des universités.

Selon Ben Robra, la question doit porter sur l'évolution historique du système d'enseignement supérieur, que ce soit à l'université ou dans l'ensemble du système. Il pense qu’il faut relier le contexte français au contexte mondial. Comment l'académie et l'enseignement supérieur se développent-ils à l'échelle internationale par rapport à la France et vice versa dans ce contexte ? Selon lui, il faut peut-être commencer par des commentaires généraux sur les connaissances, puis examiner comment cela se traduit en communs numériques pouvant être utilisés dans une université. Il n’est pas sûr que les universités utiliseront les communs numériques de la manière dont nous aimerions qu'elles les utilisent réellement. Il ne s'agit donc pas de savoir comment elles peuvent les adopter, mais peut-être de savoir comment elles les adopteraient, de quelle manière ?

Pourquoi est-il difficile de mettre en place des communs numériques dans les universités alors que, je ne sais pas, 90% d'entre elles utilisent des ressources provenant de grandes entreprises technologiques ? Quelles sont les tensions qui rendent cela difficile ?

Sébastien ShulzDocteur et enseignant en sociologie

Pour Alex Pazaitis, il aborderait cette recherche dans une perspective critique de la théorie de la technologie. Donc en mettant l'accent sur la technologie, mais pas seulement l'outil lui-même, mais la technologie vue comme un système de processus et d'actions. Qui crée réellement de la valeur à l'université et que signifie cette valeur ? Ce système n'est pas apparu de nulle part, selon lui, il est le résultat de décisions politiques conscientes qui ont conduit à ces choix particuliers.

De mon point de vue, j'aborderais cette question d'un point de vue critique de la théorie de la technologie.

Alex PazaitisChercheur chez TalTech, Membre du P2P Lab

Conclusion

Le comité conclut sur ces idées de pistes de recherche. Rendez-vous dans 6 mois pour la prochaine édition.