Extraits de la Tribune du Monde, publié le 30 octobre 2023.
Benjamin Coriat - lien externe, professeur émérite d’économie de l’Université Sorbonne Paris Nord
Stéphanie Leyronas - lien externe, chargée de recherche pour les communs à l’Agence française de développement
Kako Nubukpo - lien externe, économiste, commissaire en charge de l’agriculture, de l’eau et de l’environnement de L’Union économique et monétaire ouest-africaine/UEMOA
Ces trois économistes illustrent, dans cette tribune la floraison sur le continent africain d’initiatives économiques alternatives, à l’écart des logiques de marché, des politiques publiques et de l’aide au développement.
Le philosophe et historien camerounais Achille Mbembé - lien externe faisait, il y a peu, le constat suivant : « face à l’enchevêtrement de crises [en Afrique de l’Ouest], la démocratie électorale n’apparaît plus comme un levier efficace des changements profonds auxquels aspirent les nouvelles générations », et il est nécessaire de « miser sur une démocratie substantive », adossée à « de nouvelles coalitions sociales, intellectuelles et culturelles » (Le Monde, 4 août 2023). Ces recherches viennent confirmer que cette « quête forcenée de modèles alternatifs de développement » qu’évoque Achille Mbembé est déjà largement en actes.
Ces initiatives « en communs », variées et multiples, se déploient de manière privilégiée comme solutions palliatives lorsque tant le marché que les dispositifs d’intervention publique sont insuffisants ou absents. C’est le cas par exemple d’associations d’usagers de l’eau potable dans les quartiers périphériques de Kinshasa, ou encore des lieux hybrides culturels dans les agglomérations africaines. Dans d’autres circonstances, on voit s’affirmer des formes coopératives en résistance aux processus d’individualisation et de marchandisation. Il s’agit par exemple de coopératives d’habitat, au Burkina Faso ou au Sénégal, qui permettent aux populations précaires et de la classe moyenne de sécuriser un logement dans des contextes de spéculation et d’individualisation de l’accès au foncier urbain.