Sacha Hodencq
Chercheur invité Technische Universität Berlin
5ème édition, 27 et 28 Mars 2023
Ce séminaire - lien externe, qui s'est tenu à l'Université de Technologie de Troyes, avait pour thème "Les Communs", une alternative pertinente pour aider à effectuer notre transition vers des sociétés humaines viables ?
Le but de ce séminaire était de montrer en quoi une approche par les communs est pertinente pour les transitions socio-écologiques de nos sociétés. L’approche des communs sera introduite et expliquée en exposant leurs origines, leur cadre de définition et les formes de leur réémergence ces dernières années.
Chercheur invité Technische Universität Berlin
Informaticien, cyberphilosophe, théoricien du pair à pair, auteur et conférencier.
Maître de conférences en Sciences de l’information et de la communication à l’UFR « Culture et communication », Université de Paris VIII.
Enseignant-chercheur à l'UTC, université et école d'ingénieur à Compiègne
Historienne de l’art et urbaniste, docteure EPFL en sciences de la ville et chercheuse en résidence à l'Atelier Cartographique (Bruxelles).
Ph.D et enseignant en sociologie, Animateur du groupe "politiques des communs numériques" (CIS-CNRS), Initiateur du Collectif pour une société des communs
Michel Bauwens conclut sur la notion de "cosmolocalisme", l'idée étant de relocaliser. La relocalisation est importante car elle permet de réduire les coûts de transport, ce qui est crucial pour faire face à la crise climatique. Il peut s'agir de production artisanale de bois en matière première ou de coopératives. Michel Bauwens parle également de stigmergie comme un nouveau modèle de gouvernance collaborative, une sphère communautaire éthique et marchande. "La stigmergie est une méthode de communication indirecte dans un environnement émergent auto-organisé, où les individus communiquent entre eux en modifiant leur environnement.3"
Selon lui, il ne faut pas considérer les communs comme quelque chose de marginal. Le partage des connaissances communes doit être optimisé pour que les acteurs puissent trouver instantanément les données. Il est urgent d'optimiser les traces permettant à cette intelligence collective de passer à l'échelle. Les acteurs doivent être mis en contribution pour maximiser la synergie. Les bibliothécaires peuvent apporter leur intelligence humaine pour aider à prévoir les besoins. L'IA peut également jouer un rôle dans l'optimisation du partage des connaissances communes.
1. Pour Marine Déclève, le travail artisanal est existentiel. À travers trois auteurs et notions, elle met l'accent sur l'importance donnée au travail artisanal, à l'œuvre et à l'action.
Premièrement, elle revient sur le concept d'encastrement de Karl Polanyi1, proposé dans son ouvrage "La grande transformation" en 1944. Karl Polanyi conçoit l'économie comme la circulation des biens et l'attribution d'une valeur par des mécanismes dont le marché n'est qu'une possibilité. Pour lui, l'économie est un des principes de fonctionnement de la société, mais secondaire en général. S'appuyant sur l'histoire et l'anthropologie, il affirme qu'en général, les relations sociales de l'homme englobent son économie. C'est ce qu'il appelle l'encastrement de l'économie dans le système social. Pour elle, la réciprocité et l'hospitalité sont régies par l'économie.
Deuxièmement, elle nous parle de la notion de "Vie active" d'Hannah Arendt. "Par vita activa, Arendt désigne les trois piliers de l'activité humaine, qui sont, selon elle, le propre de notre existence : le travail, l'œuvre et l'action. Ce sont les « conditions de base dans lesquelles la vie sur terre est donnée à l'homme »"2.
Enfin, elle invoque William Morris (1844-1896)3 pour qui le travail artisanal correspondait à une vie active (labeur + œuvre + action). Morris, fabricant, designer textile, imprimeur, écrivain, poète, conférencier, peintre, dessinateur et architecte britannique, célèbre à la fois pour ses œuvres littéraires, son engagement politique libertaire, son travail d'édition et ses créations dans le domaine des arts décoratifs. Pour lui, "L'art était autrefois le bien commun de tous".
2. En deuxième partie, Marine Déclève s’arrête sur la notion de "Communalité" qui réunit le travail, l'œuvre et l'action de manière individuelle et collective. Il s'agit d'un encastrement de la vie active. Elle introduit les notions de Communs environnementaux, Communs culturels et Communs d'autoconstruction. Elle s'interroge sur comment la communalité peut-elle être un levier de transition ? Les communs urbains et les quartiers peuvent être des alternatives. Ils sont hybrides et peuvent se retrouver dans d'autres catégories de communs. Ils ne sont jamais purs et sont des espaces particuliers. On peut citer les artisanats de la connaissance territoriale, les artisanats de tiers-lieux, les artisanats de paysages en mouvement et l'artisanat lié à l'industrie.
Marine Déclève se demande comment connecter les informations et poser les questions nécessaires pour représenter les biens communs dans les territoires. Elle étudie par le biais d'un atelier cartographique au sein d'une coopérative, comment utiliser une carte pour les lieux de rencontres et les mouvements sociaux. Par exemple, l'articulation d'un logiciel avec quelque chose de matériel permet d'engager un mouvement social en présentiel. Cela soulève l'enjeu de la représentativité des biens communs pour faire apparaître leur diversité. Le fait de les représenter sur une carte n'est pas anodin et peut être une forme de normativité.
Comment susciter l'intérêt des gens pour la liberté ? Le commun peut être considéré comme un pilier ou un chemin de transverse. La question est de savoir comment, en représentant et en mettant en récit ensemble les communs, ne pas les homogénéiser et permettre les contradictions, afin qu'ils deviennent un levier de libération et d'émancipation plutôt que de simples expériences qui risquent de devenir normatives.
3. En dernière partie, Marine Déclève s'interroge sur une mise en commun du temps. Nous ne sommes pas dans un rapport marchand. La première ressource dont nous disposons est le temps : qu'allons-nous faire de ce temps pendant notre vie active ? Elle parle d'une expérience d'auto-construction au Brésil, dédier une journée par semaine à la construction. Ouvrir les frontières entre le temps de nuit et le temps de jour, laisser des espaces ouverts. On ne peut pas parler de temps sans évoquer l'espace. Il est question de réintégrer tout le monde, y compris les chômeurs, les migrants, et autres. La question se pose de savoir comment renégocier le rapport de domination, avec un lieu propice pour les personnes exclues du système de la vie - c'est une force.
Elle finit en prenant les exemples des Éco-villages, qui sont un réel exemple de partage d'expérience, essentiel pour prendre conscience de la direction dans laquelle on avance. Il ne s'agit pas d'une alternative radicale à l'État, car nous sommes immergés dans un système. Nous devons donc trouver autre chose sur lequel nous appuyer.
Cette table ronde est animée par Silvio Clément et Callista Spiteri, avec les intervenants suivants : Stéphane Crozat (UTC), Sébastien Broca (Paris VIII), Guillaume Rouyer (UTT), Sébastien Shulz (UTC) et Alain Mille (Lyon 1 Claude Bernard).
L'introduction de cette table ronde commence par une définition du numérique et des communs. Les intervenants se demandent "Quel lien peut-on faire entre les communs et la soutenabilité ?" et est-que "les communs numériques offrent-ils une voie médiane permettant d'associer protection de l'environnement et modèles économiques viables
1 Philanthrocapitalisme - lien externe
2 Uber Files - lien externe
3 Decidim, la plateforme de participation citoyenne d’envergure européenne - lien externe
4 Alexis Kauffmann, fondateur de Framasoft, rejoint la Direction du numérique à l’Education nationale - lien externe
5 Heather Marsh, Stigmergy, 2012 - lien externe
Informations
Crédits